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LES POIRES

C’était les vacances dans les années 1960. Nous étions une génération sans «phone ni ordinateur» et nous trouvions notre plaisir et notre liberté dans la nature. Aussi, souvent nous avions l’habitude de descendre à l’étang. Un groupe de garçons et filles de 13 à 17 ans, dont la balade par la traverse  s’agrémentait de rigolades, de fanfaronnades et de bravades, histoire  de s’amuser et de flirter comme on disait.

La plupart du temps on allait se baigner au bout de l’ile des pêcheurs (en fait la presqu’ile). On passait par la gare, on traversait en face, par un petit chemin le long d’un petit chenal d’eau douce qui venait d’une fontaine et se mélangeait à l’eau de l’étang.

De l’autre côté, il y avait un jardin avec des légumes et des fruits.... et surtout des «poires» délicieuses, fruits assez rares sous nos contrées.

A la fin de l’été, nous avions donc pris l’habitude de chaparder quelques fruits. C’était assez facile, car il y avait deux grosses caisses en bois percées de trous et accrochées à des piquets. Donc pour traverser le chenal, il suffisait de sauter sur l’un et sur l’autre pour arriver dans le jardin. Puis retour les bras chargés de beaux fruits que l’on s’empressait d’offrir aux autres.... surtout aux filles.... qui c’est les plus forts? : «souvent, Daniel, André, Jean-Paul et votre serviteur».

Or, un jour, notre quête s’est terminée en queue de poisson... si l’on peut dire. Daniel et moi venions de passer du côté du jardin et attendions André.... et là.... tout à coup a retenti un grand «craccc». Le temps de se retourner et de voir André dans la caisse de l’eau jusqu’à la poitrine. Et puis de grands cris.... «les serpents, les serpents....» et oui de la caisse brisée sortaient des «serpents».... en fait il s’agissait d’anguilles, des dizaines, des centaines d’anguilles.... Et André , tétanisé, continuait à hurler.... Il fallait faire quelque chose.... mais quoi... Je n’avais vraiment pas envie de me jeter à l’eau au milieu de ces bestioles.... courageux, oui mais pour piquer des poires pas pour nager au milieu de ces anguilles.... «bon me dit Daniel, faut y aller sinon on va se faire piquer».... «ouais, d’accord» surtout qu’André gueulait toujours. «Faut qu’on le sorte sinon il va se faire bouffer» et André qui «regueulait encore plus fort».... «mais non dit Daniel, ça risque rien... allez on saute».... Et plouf, et plouf.... nous voilà à l’eau.... A deux on prend André par les épaules, on le tire et on le sort de l’eau devenue opaque entre notre agitation et celle des anguilles tout aussi affolées que nous.

Autant vous dire que nous n’avons pas trainé à remonter au village....  Le soir, ceux qui attendaient leur pitance habituelle au bord de l’étang ont bien sûr chercher à savoir pourquoi nous étions remontés.... Daniel à son habitude plein de répartie a raconté une histoire de poursuite aux perdreaux... les autres ont bien sûr tout gobé, comme ils l’auraient fait des belles poires.

Ce n’est que deux jours après que mon grand-père m’appris l’épilogue de cette épopée. Quand il lisait son journal, il faisait toujours des commentaires et là il raconta à la cantonade que les gendarmes étaient venus à la gare pour faire une enquête sur un vol d’anguilles. Les «bandits» avaient brisé une des caisses en bois pour récupérer, surement avec un sac en toile de jute les «bestioles» tant appréciées (autant que les poires). En plus, ils devaient être au courant, car ils n’avaient cassé que celle qui était pleine.»

Tout petit... tout petit qu’il se faisait le jidé.... Depuis, j’aime moins les poires.....

Bien sûr, il y a prescription et peut-être que les prénoms ne sont pas les bons !!!

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